Théron toujours vital
Il crée « le jeune homme et la mort » à Montpellier jeudi et vendredi. Pour Mouvements sur la ville, festival de danse off et gratuit, qu’il co-dirige avec Yann Lheureux et Hélène Cathala, Didier Théron choisit Maurice Ravel. Pas seulement pour son Boléro dont il a tiré un triptyque féministe en 2010, lors de l’Exposition universelle de Shanghai, mais pour Daphnis et Chloé, symphonie chorégraphique de 1912, pour les Ballets russes.
Ancrée dans l’histoire
Les émois contrariés de cette pastorale lyrique sont là pour décaler la tragédie du jeune homme et la mort, mélodrame de Jean Cocteau, dansé à la création en 1946 sur Passacaille de Bach, dont il a retenu le livret. « Comme lui, je me suis affranchi de la temporalité, pour célébrer la jeunesse, dans ces combats de 14-18 ou du 22 août 1944, en passant par les victimes du Bataclan en 2015, qui ont foudroyé sa vitalité. »
Les deux partitions conjointes de Cocteau et de Ravel sont démultipliées par une danse de trois hommes car, selon les termes de Joë Bousquet, dont s’inspire le chorégraphe, « il n’y a pas d’œuvre de l’homme seul. Sa blessure ne fait que le traverser. Elle s’élargit dans l’humanité des autres hommes ».
Ancrée dans l’histoire et l’actualité mais aussi dans l’univers prémonitoire de Ravel, très impliqué dans la guerre de 14, cette pièce de 55 minutes installe les interprètes dans le dispositif d’un cercle où ils sont voués à « enjamber les morts ». Pour Théron, la métaphore est cruciale. Innervée de courses, de sauts et d’envolées spiralées, la danse se veut « dépassement de ce qui nous accable ».
C’est aussi un renouvellement de cette résistance dont il défend l’idée depuis 24 ans à la tête de sa petite « fabrique » à la Paillade, où il accueillera plusieurs créations de Mouvements sur la ville jusqu’au 5 juillet.
Lise OTT